En France, la moitié des adultes n’ont pas une activité physique suffisante au regard des recommandations standards. Or, c’est prouvé, la marche à pied et le vélo sont bon pour la santé physique et mentale.
Les mobilités, l’urbanisme et les enjeux de santé publique sont des notions intimement liées. Dès la fin du XIXe siècle, les travaux des premiers urbanistes hygiénistes contribuèrent à résorber des poches d’insalubrité, assainir les villes et juguler la propagation des maladies infectieuses. Ils furent également le prologue du développement des grandes avenues et d’espaces de circulation qui caractérisèrent la ville fonctionnaliste et la mise au pas d’un développement urbain favorisant l’usage de l’automobile.
Aujourd’hui, le rapport entre la ville, le territoire et la santé a évolué : les principaux facteurs de morbidité sont structurés autour de pathologies dites « chroniques » comme le diabète, l’asthme, les cancers, les maladies cardiovasculaires. La dimension chronique implique qu’elles dégradent progressivement notre état de santé, qu’elles sont diffuses et répandues au sein de la population, notamment chez les catégories les plus défavorisées. La récente crise de la Covid-19 nous rappelle également avec force que nous ne sommes pas à l’abri des résurgences épidémiques et que les politiques d’aménagement, les conditions socio-économiques, ainsi que les modes de vie et de déplacement exercent une influence déterminante sur l’état de santé.
En France, les déplacements motorisés, l’étalement urbain et l’allongement des distances domicile-travail ont un impact majeur sur la santé de la population. L’équipe NEMESIS de l’INSERM (2016) a établi un constat sans appel sur le niveau de sédentarité des habitant·es en Ile-de-France. Les personnes utilisatrices d’une voiture, d’une moto ou d’un scooter ne réalisent en moyenne que 8 minutes d’activité physique, à pied généralement, dans le cadre de ce déplacement, alors que les utilisateurs d’un vélo ou d’un transport en commun pratiquent respectivement 48 et 27 minutes d’activité physique par jour. L’alliance vertueuse entre marche et transport en commun pose l’enjeu de l’intermodalité comme un des principaux vecteurs d’activité physique au quotidien.
La sédentarité, et le manque d’activité physique seraient, d’après des travaux de la Harvard Medical School, à l’origine de 6 à 10 % de quatre grandes maladies non-transmissibles (maladie coronarienne, diabète de type 2, cancers du sein et du côlon). En France, deux tiers des adolescents et la moitié des adultes n’ont pas une activité physique suffisante et ne suivent pas les recommandations de l’ANSES et de l’Organisation mondiale de la santé (OMS).
L’utilisation des transports motorisés contribue également à l'augmentation de l’exposition humaine à des nuisances environnementales. La pollution de l’air ambiant causerait la mort prématurée de 40 000 personnes en France chaque année, ce qui représente 7% de la mortalité. Les transports routiers seraient la seconde source d’émission de particules fines à l’origine de ces décès prématurés. La pollution de l’air aggrave aussi l’état de santé des populations vulnérables, les personnes âgées, les enfants, les malades cardiaques ou les insuffisants respiratoires.
On estime aussi que 75 000 années de vie en bonne santé seraient perdues chaque année dans l’agglomération parisienne à cause des troubles du sommeil et de la gêne liée à la pollution sonore des transports, dont 85% serait du bruit routier. Enfin, le développement des villes et des territoires favorables au « tout voiture » augmente les risques accidentogènes. En 2019, 94% des décès liés à des collisions sur la route ou dans l’espace public en France auraient impliqué des personnes conduisant des deux-roues motorisés, voitures et poids lourd. Les causes de ces collisions sont plurielles (aménagements, entretien des routes, facteurs individuels, etc.). Mais elles soulignent la vulnérabilité des personnes à pied et à vélo, face aux personnes conductrices de véhicules motorisés. Le risque accidentogène est en revanche beaucoup plus faible dans les interactions entre modes de transports plus durables (marche, vélo et usage des transports en commun).
L'OMS conseille de pratiquer au moins 60 minutes quotidiennes d’activité physique modérée pour les enfants et un minimum de 30 minutes pour les adultes. L’une des solutions préconisées par l’organisation est d'augmenter la part des déplacements actifs, principalement à pied et à vélo. La pertinence de ces préconisations a été récemment confirmée par une étude de l’Université du Massachusetts (2021) et par une autre de Harvard (2021). Ces études démontrent les bienfaits d’une pratique quotidienne de la marche (7 000 à 7 500 pas par jour).
Également bénéfique, la pratique du vélo pendant une heure hebdomadaire réduirait le risque de survenue du diabète de type 2 de 20 à 50%. Une étude de l’ADEME souligne ainsi que les bénéfices sanitaires du vélo liés à la pratique d’activité physique (diminution du risque de mortalité de 27 à 41% en fonction des publics) seraient largement supérieurs aux risques associés à une exposition en période de pic de pollution.
L’INSERM a évalué qu’une augmentation de l’activité physique quotidienne permettrait d’économiser 2 milliards d’euros de soins liés au diabète, 2,2 milliards d’euros sur les dépenses liées à l’obésité et 500 millions d’euros sur le traitement du cholestérol.
L’impact favorable des mobilités actives sur la santé mentale et le bien-être en général des personnes qui en pratiquent régulièrement a également été démontré par de nombreuses études. La marche réduit les symptômes physiques associés au stress et à l’anxiété en contribuant à augmenter la qualité du sommeil. En parallèle, la pratique du vélo diminue le nombre d’absences au travail de plus d’un jour par an chez les cyclistes par rapport aux non cyclistes. Une étude anglaise souligne ainsi que 94% des marcheurs et des cyclistes interrogés se sentent en meilleure santé psychologique grâce à cette pratique. Les effets positifs du vélo et de l’activité physique sur les fonctions cognitives des personnes âgées ont aussi été démontrés.
Les politiques d’aménagement ainsi que les contextes sociétaux et environnementaux ont un impact majeur sur les comportements de mobilité et l’état de santé des personnes. Le développement de mobilités plus durables, marche, vélo et transports en commun, constitue un levier pour améliorer la santé physique et mentale de tous. Il faut cependant tenir compte du fait que les ménages les plus vulnérables sur le plan socio-économique sont plus exposés aux nuisances environnementales. Ils sont aussi plus éloignés des messages de prévention et disposent de moins de ressources financières et culturelles pour adapter leurs comportements.
Sources :
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